Syndrome de la page blanche

Ces temps-ci, j’ai de la difficulté à trouver l’inspiration donc, j’ai décidé de voir un film. Certains diront que c’est de la procrastination, mais consommer de la culture me donne le goût d’écrire. Une muse vient me chatouiller les doigts lorsque je visite un musée, quand je lis un roman ou que j’écoute de la bonne musique. Et, c’est justement ce que suggère l’auteur Ankit Singh dans son article sur medium.com: How to write when you don’t feel like it at all. Je me suis installée, un matin, avec un cahier et un crayon tout près de moi pour regarder le film : Florence Foster Jenkins avec Meryl Streep et Hugh Grant.

Ce film m’a fait réfléchir. Vous savez, pour avoir lu mon article sur le livre Devenir de Michelle Obama, que je ne suis pas musicienne. J’aime la musique, mais je n’y comprends rien d’un point de vue technique. Malgré cela, je peux attester que Florence Foster Jenkins chantait faux d’une façon abominable.

Qui est Florence Foster Jenkins?

J’ai fait des recherches sur cette cantatrice. Il semblerait qu’elle aurait inspiré Hergé pour son personnage caricatural de la Castafiore. Selon Wikipédia,

«Florence Foster Jenkins, née le 19 juillet 1868 à Wilkes-Barres et morte le 26 novembre 1944 à New York, est une chanteuse soprano américaine. Elle est notamment connue et ridiculisée, en tant que chanteuse lyrique, pour son manque total de rythme, de justesse et de timbre, sa prononciation aberrante et plus généralement son incapacité à chanter correctement.»

Sur Wikipédia, vous pouvez même l’entendre grâce à un extrait sonore  !

Dans le film, on apprend que cette femme a contracté la syphilis de son mari lors de son voyage de noces à l’âge de dix-huit ans.  Elle a vécu jusqu’à soixante-seize ans. Dans l’histoire, après l’avoir examiné, un médecin fait la remarque qu’il n’a jamais vu quelqu’un survivre à cette maladie pendant plus de cinquante ans.

Florence est une riche héritière et elle n’a pas eu un seul enfant. Après son divorce, elle a eu une relation platonique avec son agent, St-Clair Bayfield, qui l’a protégée des mauvaises critiques tout au long de sa carrière.

Elle aurait voulu être pianiste. Ses problèmes de santé l’en ont empêché, car les nerfs de sa main gauche étaient endommagés.

À la fin de sa vie, elle a chanté devant une salle comble au Carnegie Hall. Cela se passait en 1944 et elle avait offert gratuitement un millier de billets à des soldats de la Deuxième Guerre mondiale. Elle les a divertis, mais peut-être pas de la façon dont elle aurait voulu. Ils ont cru à une comédie.

Carnegie Hall en 2021 crédit photo Kit4
Carnegie Hall en 2021 crédit photo Kit4

Un film qui suscite des questions

Comment définit-on le succès  ?

Est-ce qu’en étant riche, on peut se payer n’importe quoi, y compris une prestation à Carnegie Hall ?

Peut-on vivre nos fantasmes artistiques si l’on est son propre mécène ?

Est-ce que se bercer d’illusions est bon pour la santé ?

Ou est-ce plutôt le fait de pratiquer un art qui aide à survivre à une maladie grave ?

Plusieurs conclusions

En tout cas, je ne crois pas qu’elle souffrait du syndrome de l’imposteur!

Sa carrière est un exemple frappant des valeurs superficielles qui régnaient, à cette époque, dans certains groupes de la riche société new-yorkaise.

Jusqu’à un certain point, avec sa connaissance de l’art musical, madame Foster Jenkins devait bien comprendre qu’elle n’était pas la meilleure soprano au monde.  Son amour du chant la fait persévérer et assurément le plaisir qu’elle retirait de cette activité.

Elle a fait une démonstration de courage et de générosité en montant sur la scène du Carnegie Hall.

L’art musical et le sport

Ayant étudié en science, on m’a inculqué à faire confiance aux chiffres et aux faits prouvés rigoureusement. J’ai toujours eu un malaise par rapport à la subjectivité de l’art. J’ai plus tard appris qu’on aime une œuvre d’art à cause de l’émotion qu’elle nous fait ressentir. Et ce qui lui donne de la valeur, c’est si elle en suscite chez un grand nombre de personnes.

Le premier émoi que nous fait vivre l’œuvre de Florence est négatif. On ne peut pas croire qu’elle persévère à chanter malgré son peu de talent. Pourtant, à force de l’écouter, on sent sa ténacité. On ne peut qu’avoir de l’admiration pour cela.

C’est comme dans le sport, il n’y a pas seulement des athlètes élites. Tous les amateurs d’activité physique de ce monde ressentent aussi cette agréable impression d’être vivant. Et cela est accepté. Pourquoi cela devrait-il être différent dans tous les arts ?

Les émotions et la santé

Madame Foster Jenkins a souffert de syphilis à partir de l’âge de dix-huit ans. Pendant l’enfance, elle a appris à jouer du piano. De là, son amour de la musique.

On sait depuis toujours que de violentes colères peuvent provoquer des crises cardiaques ou d’apoplexie. Il existe plusieurs études scientifiques sur le sujet.

Peut-on en conclure que les émotions positives sont bonnes pour la santé ? Mon expérience de vie m’en a donné la conviction profonde.

J’ai l’impression que les sentiments ressentis par cette cantatrice lorsqu’elle chantait étaient tels que cela a aidé sa condition. Cela lui a-t-il permis de vivre si longtemps avec cette maladie ?

Une personne unique

Madame Foster Jenkins malgré son manque de talent était unique. Elle a performé pendant une trentaine d’années. On a réalisé deux films sur son histoire.

Sa profonde humanité nous émeut. Et c’est pour cela qu’on parle encore d’elle de nos jours.

Est-ce Florence Foster Jenkins ou la prestation de Meryl Streep qui a réussi à m’asticoter les doigts ? Vous aurez compris, que regarder ce film m’a touchée et j’admire cette mauvaise cantatrice pour son courage et son indécrottable persévérance.

Sur son lit de mort, elle a dit : «On pourra dire de moi que je ne savais pas chanter, mais on ne pourra jamais dire que je ne l’ai pas fait.»

Elle avait tout à fait raison.

Pour terminer sur une note new-yorkaise, voici une photographie de Lhom.

Et vous? Connaissiez-vous Florence Foster Jenkins? Qu’en pensez-vous?

Phrenssynnes