Une brève éternité – Philosophie de la longévité
J’ai lu, sur la recommandation d’un ami, le livre Une brève éternité de Pascal Bruckner publié en 2019. J’ai emprunté le livre à ma bibliothèque municipale.
Quatrième de couverture

Ce que j’ai aimé
Tout d’abord, l’auteur m’a fait sourire. Au début du livre, il nous montre qu’à la fin du XIXe siècle, être jeune était un désavantage. Les jouvenceaux de vingt ans se vieillissaient pour réussir ! Aujourd’hui, ce sont les baby-boomers qui essaient de se rajeunir. Les temps ont bien changé.
L’auteur a un grand vocabulaire et il excelle dans la jonglerie littéraire.
On dit qu’une œuvre d’art de grande valeur évoque des sensations chez un nombre considérable de personnes. Selon cette définition, cet ouvrage peut être une importante réalisation. Oui, j’ai ressenti beaucoup d’émotions en lisant ce bouquin, mais pas celles qui sont agréables à avoir. Si vous aimez voir des films d’horreur pour vous sentir vivant, peut-être apprécierez-vous ce livre.
Ce que j’ai moins aimé
Après m’avoir fait sourire, ce livre m’a secouée.
« Douche froide
Reste cette duperie fondamentale : ce n’est pas la vie que la science, les techniques ont prolongé, c’est la vieillesse. »
Moi, ce n’est pas une douche froide que j’ai ressentie, cela m’a plongée dans une prise de conscience qui m’a si déprimée que j’ai mis le livre de côté pendant quelques jours. Le pire c’est que l’auteur n’a pas tort.
Puis l’écrivain demande ce qu’on fera de ces années de vieillesse de plus.
Il parle des philosophes, de Freud en déployant des acrobaties de vocabulaire. Puis, il arrive à ce double postulat contradictoire :

Cliquez ici pour lire d’autres articles sur Phrenssynnes se cultive.

« ; vis comme si tu devais t’éteindre à chaque moment, vis comme si tu ne devais jamais mourir. »
Plusieurs citations dans Une brève éternité
Oui, il fait résonner quelques grandes évidences que nous éprouvons comme grands-parents.
« […] ceux-ci, dans une sorte de transmission inversée, doivent se soumettre alors aux ordres de leurs propres fils et filles qui savent mieux ce qui est bon pour leur progéniture : permission de s’occuper des petits, mais aux conditions des jeunes géniteurs. »
Ensuite, dans ses voltiges littéraires, il cite Platon :
« Les yeux de l’esprit ne commencent à être perçants que quand ceux du corps commencent à baisser. »
Oui, on voudrait tous refaire notre vie de vingt ans avec notre expérience de soixante ans. On le savait déjà.
Il continue, par la suite, avec de belles citations :
« Le drame de la vieillesse, disait Oscar Wilde, c’est qu’on reste jeune. »
Effectivement, nos émotions ne déclinent pas. Tel que je le dis depuis des années, à la blague : ça fait seulement deux ans que j’ai cinquante ans, je ne suis pas encore habituée.
À nouveau, un paragraphe pour vous démolir le moral :
« À partir de la cinquantaine, on s’étonne d’être toujours gaillard, alors que tant d’autres ont déjà tiré leur révérence. Les enterrements deviennent aussi fréquents que les mariages ou les baptêmes. »
C’est une constatation que nous expérimentons tous, je me demande ce que cela m’apporte de la lire.
Après, il s’en prend aux photographies de famille.
« Qu’est-ce qu’une photo de famille, des petits-enfants aux grands-parents? Un conte cruel qui nous dit : voilà ce qui va vous arriver. Les jolies frimousses se froisseront, les cheveux tomberont, les silhouettes se déformeront jusqu’à devenir méconnaissables. »
Quelle façon négative de voir quelque chose qui est supposé être un plaisir. À mon avis, prendre un portrait de famille, c’est plutôt se bâtir des souvenirs pour se remémorer des moments heureux avec ceux qu’on aime.
Et Bruckner continue avec une suggestion. L’objectif n’est pas d’avoir une vie réussie, mais une vie épanouie. Il discourt pendant plusieurs pages sur une véracité pour moi. Je ne me suis jamais dit que j’ai réussi ma vie, comme si le succès était la finalité. C’est peut-être l’opinion de plusieurs, mais pas la mienne. Je crois que le but demeure l’épanouissement et cela est d’une telle évidence que je ne vois pas l’intérêt à l’expliquer sur plusieurs pages.
Pascal Bruckner écrit 256 pages sur le sujet, mais une grande partie réside en des citations. C’est une preuve que l’auteur a lu beaucoup.
Il termine avec un léger ton d’espoir :
« Le seul mot que nous devrions prononcer chaque matin, en reconnaissance du cadeau qui nous a été fait, c’est : Merci.
Rien ne nous était dû. »
Je préfère cette citation de Coluche :

Photo de Lhom
Lhom nous offre cette semaine une photographie d’un paysage français. Nous aimerions tous être presque éternels comme ces vignes de Châteauneuf-du-Pape.

J’essaie encore de trouver le nouveau dans les propos de l’auteur. À part la douche froide au début, je ne vois pas.
J’aimerais bien avoir vos commentaires si vous avez lu cet essai.
Bonne semaine.
Phrenssynnes
P.S. Pascal Bruckner et ses éditeurs n’ont pas été mis au courant de ce projet avant publication.
Lorsque vous êtes abonné, tous les samedis matin, mon article aura déjà atterri dans votre boîte courriel prêt à être consulté pendant que vous savourez votre café.
It’s as if the author plays with words to knock us out with hard-hitting truths. It’s a French book, you could read something else to practice reading this language.
This book seems a bit depressing; especially the funeral quote because it’s true.
Et bien! Moi qui croyais que tu l’avais tout lu!
Moi, je dois dire que j’avais déjà fait cette prise de conscience, c’est-à-dire qu’on vit beaucoup plus vieux. Et cela, grâce à mon travail d’optométriste.
C’est vrai qu’on est chanceux de vivre plus longtemps même si c’est la vieillesse qui s’est rallongée.
Je suis comme toi, j’essaye d’améliorer mes habitudes et de profiter au maximum du bon temps.
Merci pour ton commentaire Tino.
Ah! Ah!mon est sur la même longueur d’onde.
Bon week-end Isabelle.
Oh, pas sûre que j’aurais envie de le lire! Ça semble un peu déprimant… Déjà que j’ai pris conscience, en entrant dans la cinquantaine, que la vieillesse n’était plus si loin, je n’ai pas vraiment le goût d’y penser tant que ça. Je préfère la citation de Coluche, moi aussi!
Bon samedi!
Bien d’accord sur plusieurs points Phrenssynnes et effectivement ce livre peut être un peu déprimant – c’est pourquoi je ne l’ai pas lu jusqu’à la fin. Tu as été plus tenace que moi.
Je vais plutôt commenter sur mon expérience personnelle de la constatation que ce livre m’a permis de faire et moins sur l’écriture de Bruckner.
Avant tout, ce que j’ai retiré de cet ouvrage c’est la prise de conscience que notre génération et celles à venir ont des dizaines d’années de plus dans leur valise de vie.
Mes ancêtres du XIXe siècle seraient déjà morts depuis plus de 20 ans. Et me voilà grâce aux progrès de la médecine et peut-être une prise de conscience que je ne suis pas juste en vie mais dans la meilleure forme que je n’ai jamais été. Mon arrière-arrière-arrière grand-père serait déjà décomposé depuis longtemps et ceci me fait réfléchir à toutes les belles choses et aux mauvais coups que j’ai fait depuis ma date d’expiration selon nos ancêtres. En fait ce livre me fait réaliser le beau cadeau que nous avons. C’est comme recevoir un boni en plus de ta paie normale. Certains vont mettre ce surplus d’argent à la banque pour leurs vieux jours. De mon côté ce livre m’a dit de me gâter avec ce bonus car c’est du surplus.
Je prends un café par jour au lieu de trois mais un maudit bon. Je mange une pizza par semaine mais c’est moi qui la fait avec des ingrédients naturels; je me suis débarrassé de mon vieux Torpédo et je l’ai remplacé par un vélo qui pèse moins que mes souliers, et je vois deux fois plus de paysage. Je suis parti de la ville pour respirer l’air pur des Laurentides. Et si jamais je m’ennuie, je prends mon petit bolide, je baisse le toit, je monte le volume avec une chanson de Zucchero et je file en changeant de vitesse sur les routes serpentant Gore. Bruckner n’a pas changé mon mode de vie mais il a confirmé la valeur du bonus.
« Puis l’écrivain demande ce qu’on fera de ces années de vieillesse de plus. » À ce point je n’étais plus intéressé au reste du livre. Comme tu as bien dit « L’auteur a un grand vocabulaire et il excelle dans la jonglerie littéraire. ». Après 80 pages j’avais peur qu’il déforme ce qu’il avait instauré dans moi qui était formidable.